Comme elle ne touche qu'une minorité plutôt aisée, la politique de la Ville de Paris vis-à-vis des clubs sportifs du Bois de Boulogne n'émeut guère les médias et ne fait pas pleurer dans les chaumières. Il s'agit pourtant d'une action de spoliation systématique, inutile et injustifiée, dont le seul motif est de faire plaisir aux élus Verts de la capitale, qui ont manifestement choisi le Bois comme terrain privilégié de la lutte des classes, modèle XXIème siècle.
Les 850 hectares du Bois de Boulogne abritent en effet 46 concessions (hippodromes, restaurants, clubs sportifs), qui permettent à des activités privées de s'y installer pour une certaine durée, moyennant une redevance versée à la ville et le respect d'un cahier des charges rigoureux. En dehors des très grandes concessions (33 ha pour l'hippodrome d'Auteuil, 57 ha pour l'hippodrome de Longchamp, 20 ha pour le Jardin d'Acclimatation), celles dévolues aux clubs de sport (Croix-Catelan, Tir aux Pigeons, Polo de Paris, Cercle de l'Etrier et autres) ne représentent au total qu'une quarantaine d'hectares, et ne gênent donc en rien l'accès libre des Parisiens au plus grand espace vert de l'ouest de la capitale. Ces concessions rapportent de l'argent à la Ville et garantissent un entretien parfait de l'environnement dans les parcelles concernées, ce qui est loin d'être le cas dans les parties publiques du Bois ! En échange, ces concessions permettent à leurs membres, moyennant droits d'entrée et cotisations annuelles, de pratiquer des activités sportives dans un cadre privilégié. Il est à noter que toutes les capitales cherchent à disposer de ce type d'installations, qui font partie des critères d'attractivité des grandes villes internationales.
Or, à Paris, c'est tout le contraire. Sous prétexte de "démocratiser" le Bois de Boulogne et de le "rendre aux Parisiens", Bertrand Delanoë et sa majorité se sont lancés dans une véritable entreprise de spoliation des clubs concernés. L'an dernier, le Racing Club de France s'est ainsi vu retirer la concession de la Croix-Catelan, dont il occupait les 7 hectares depuis 120 ans, alors que de l'avis général le RCF, concessionnaire irréprochable, aurait dû être renouvelé de gré à gré comme il l'avait toujours été ! Au terme d'une procédure d'appel à candidatures aussi opaque qu'arbitraire, les 55 millions d'euros d'installations sportives construites sur le site exclusivement grâce à l'argent des membres du RCF, soit 2 piscines, 49 courts de tennis, un club-house et des restaurants, ont été données pour vingt ans à M. Arnaud Lagardère, grand ami du maire de Paris depuis l'aventure calamiteuse de "Paris 2012", pour y faire du sport-business ! Le même M. Lagardère avait pourtant déjà reçu en 2004, du même M. Delanoë, la concession du stade Jean-Bouin, également pour y faire du sport professionnel ! Conséquence majeure : privé de son "poumon financier", qui lui permettait de financer, grâce à "l'argent des riches", des sections sportives dans des quartiers populaires, le Racing Club de France, le plus ancien club omnisports français et le plus titré au niveau national, européen et olympique, a dû fermer ou céder la plupart de ses activités, et son modèle de sport associatif sans but lucratif a été ainsi mis à mort par une municipalité soi-disant de gauche, alliée au "grand capital" !
Et cette entreprise de spoliation se poursuit. C'est aujourd'hui le Cercle du Bois de Boulogne, plus connu sous le nom de "Tir aux pigeons", qui est menacé de dépeçage. Une partie de ses 8 hectares serait "municipalisée" et ouverte au public, tandis que la surface restante serait occupée conjointement (?) par le CBB et la Ligue de tennis de Paris, qui y installerait un "pôle d'excellence", afin d'y entrainer notamment Richard Gasquet et Gaël Monfils. L'affaire tourne d'ailleurs à la bouffonnerie : les mêmes Gasquet et Monfils sont censés être entrainés simultanément au Centre fédéral de Roland-Garros (ils sont membres de l'élite nationale), au stade Jean-Bouin et à la Croix-Catelan (ils sont membres du Team Lagardère), et maintenant sur les courts du Tir aux pigeons comme membres de la Ligue de Paris ! Il est à noter que leurs performances dans les grands tournois, comme l'a montré le dernier Open de Roland-Garros, semblent être inversement proportionnelles au nombre d'installations dont ils disposent pour leurs entrainements... Quand aux adeptes du tir, qui est toujours sport olympique et dont le CBB est un des seuls sites d'entrainement en région parisienne, ils ont été priés d'aller se faire voir ailleurs.
Un bon conseil à Bertrand Delanoë : plutôt que de pratiquer la "chasse aux riches" dans le Bois de Boulogne, qu'il se préoccupe un peu de l'état pitoyable dans lequel se trouve la partie publique de cet espace vert. Il est inadmissible que toutes les séquelles de la tempête de 1999 n'aient pas encore été réparées, comme il est inadmissible que l'on y marche régulièrement sur les bouts de verre, les papiers gras et les préservatifs usagés. Cela serait une bien meilleure politique, au service de tous les Parisiens, que celle qui consiste à priver le Bois de Boulogne d'installations qui ont fait son prestige et qui participent utilement à l'offre sportive de la capitale.
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