Extraordinaires, ces commentaires émanant de la gauche judiciaire au sujet de la confirmation par Nicolas Sarkozy qu'il n'y aurait pas de grâce collective à l'occasion du 14 juillet ! Alors que ces gens-là n'avaient chaque année pas de mots assez durs pour critiques cette "survivance monarchique" et cet "abus de pouvoir régalien" que constituait selon eux le droit de grâce présidentiel, les voici qui nous expliquent sur toutes les radios et télévisions que la décision du chef de l'Etat va "aggraver la surpopulation pénitentiaire" et "mettre en danger les surveillants" car elle "pousse les prisonniers au désespoir".
D'ailleurs, à entendre certains syndicalistes de la magistrature, le surnombre - bien réel - de détenus dans les établissements français est imputable au "tournant répressif de 2002", c'est-à-dire à l'arrivée de Sarkozy place Beauvau ! Alors que des esprits simples croyaient jusqu'alors que l'augmentation de la population pénitentiaire était due à l'explosion de la criminalité et de la délinquance entre 1997 et 2002, explosion qui avait valu aux socialistes la raclée que l'on sait à la précédente présidentielle... Quoi qu'il en soit, cette affaire du 14 juillet prouve que certains magistrats font passer leurs a priori politiques avant la rigueur des faits ou la constance de leurs convictions.
Des juges très politiques, on en trouve également à la Cour d'Appel de Paris, en particulier ceux de la 18ème chambre, présidée par Jean-Louis Verpeaux, qui viennent de rendre un jugement très remarqué sur le Contrat Nouvelle Embauche (CNE) en l'estimant non conforme à la convention 158 de l'Organisation Internationale du Travail, dont la France est signataire. Il n'y a juridiquement rien à reprocher à la première partie de sa décision, qui estime que la période d'essai de deux ans qui caractérise le CNE, période pendant laquelle le salarié peut être licencié sans motif, est "déraisonnable" et "prive le salarié de l'essentiel de ses droits en matière de licenciement" pendant trop longtemps. De nombreux spécialistes des affaires sociales avaient tenté - vainement - de faire comprendre à Dominique de Villepin et à ses conseillers que la durée maximale admise pour une période d'essai dans des pays comparables au nôtre est d'une année : ce qui peut en effet sembler un délai "raisonnable" pour que l'employeur se fasse une opinion sur le salarié et sache s'il a suffisamment de travail pour le conserver.
Mais, non contents de cette démonstration imparable, voilà que nos juges se lancent dans une diatribe virulente contre le principe même de la flexibilité du marché de l'emploi ! "Dans la lutte contre le chômage, écrivent-ils, la protection des salariés dans leur emploi semble être un moyen aussi pertinent que les facilités données aux employeurs pour les licencier", avant de conclure dans la même veine : "Il est pour le moins paradoxal d'encourager les embauches en facilitant les licenciements".
Objection, Votre Honneur !, comme on disait jadis dans les téléfilms américains. A suivre ce beau raisonnement, il suffirait donc d'interdire les licenciements pour garantir le plein emploi. Et comment expliquer que la plupart des pays qui ont des taux de chômage moitié moins élevés que le nôtre ont déréglementé le marché du travail en facilitant aussi les licenciements ? Un juge de Cour d'Appel est-il donc si imperméable à la logique économique qu'il ne comprenne pas qu'un droit social excessivement rigide pousse l'employeur à ne surtout pas embaucher, quitte à multiplier les contrats à durée déterminée ou les recours à l'intérim ? A moins que, comme on peut le craindre, ce jugement ne soit très fortement inspiré par des considérations politiques et par une hostilité viscérale au système libéral-capitaliste.
Voici en tout cas l'actuel gouvernement prévenu : tous les textes de loi, tous les décrets d'application, toutes les réformes en cours ou à venir seront soumises par ses adversaires à l'appréciation de la justice. Compte tenu de la façon très politique dont une partie de l'institution judiciaire aborde les dossiers, mieux vaut que les textes en question soient soigneusement "bétonnés" quant à leur contenu. Sans quoi il ne manquera pas de "petits juges" pour tenter d'entraver la rupture, pourtant voulue par une majorité du peuple français.
Commentaires