Nous soulignons assez fréquemment, sur ce blog, les aspects positifs de la politique mise en oeuvre par Nicolas Sarkozy pour pouvoir nous permettre d'en relever les insuffisances. Voire, dans le cas précis, les manques, puisque c'est d'une absence remarquée qu'il s'agit : celle de la politique familiale. Il est tout de même frappant que le président de la République prend des initiatives sur tous les dossiers chers à son électorat - identité nationale, sécurité, fiscalité, liberté d'entreprendre, service minimum... - sauf sur un, pourtant essentiel : la famille.
Cet état de fait s'est d'abord traduit dans la formation des deux gouvernements Fillon : personne n'y est en charge de la famille, même pas au niveau d'un secrétariat d'Etat. Renseignements pris, Xavier Bertrand, ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité, traiterait les dossiers liés aux affaires familiales. Il dispose bien d'une Secrétaire d'Etat en la personne de Valérie Létard, mais celle-ci est affectée à la Solidarité. Rien ni personne, donc, pour la famille : force est de constater que c'est une première sous la Vème République.
Le malaise se poursuit avec la disparition de la Conférence annuelle de la Famille, qui se tenait généralement au printemps. Compte tenu des élections présidentielles et législatives, son report à l'automne n'aurait surpris personne. Mais voilà qu'on apprend que le gouvernement envisage sa suppression pure et simple, et son remplacement par un "Conseil d'orientation des politiques familiales", qui regrouperait des représentants de tous les ministères concernés, des associations familiales et du Parlement. Cela est envisageable, puisque la formule de la Conférence annuelle semblait avoir fait son temps. Mais deux remarques s'imposent immédiatement :
- Pourquoi ne pas avoir déjà mis en place ce Conseil d'orientation, alors que tant de commissions et de comités divers ont été formés et se sont mis au travail depuis quatre mois ?
- Que va faire le gouvernement pour cette année, puisque la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille est toujours en application, qu'elle prévoit dans son article 41 que "le gouvernement organise chaque année une conférence nationale de la famille à laquelle il convie le mouvement familial et les organismes qualifiés", et que la dernière a eu lieu en 2006 ? Or Nicolas Sarkozy connaît parfaitement cette loi, puisqu'il en fut co-signataire en tant que ministre du Budget et porte-parole du gouvernement...
Dernière source d'inquiétude sur ce sujet : la récente "Lettre aux éducateurs" de Nicolas Sarkozy. Certes ce texte - par ailleurs bienvenu - réaffirme que les parents "sont les premiers des éducateurs". Mais il ne leur consacre guère qu'une dizaine de lignes (lire ci-dessous) sur un texte de trente pages !
Cette absence de la famille dans la politique sarkozienne est préjudiciable à plus d'un titre. D'abord parce qu'on attend d'un président de droite, dans une période où beaucoup - notamment les jeunes - sont à la recherche de repères, qu'il réaffirme avec force que la famille est la cellule de base de la société, celle qui permet la transmission harmonieuse des valeurs et des savoirs entre les générations, et qu'il prenne des mesures destinées à la protéger et à la renforcer : un éventuel "statut du beau-parent", d'ailleurs jugé inutile ou dangereux par bien des spécialistes, ne saurait tenir lieu de politique familiale ! Mais aussi parce que ce silence sur un sujet essentiel nourrit tous les mauvais procès que certains à droite veulent faire à un chef de l'Etat dont le style et la personnalité les déconcertent et les irritent. Il appartient maintenant à Nicolas Sarkozy de dissiper ce malentendu naissant. Le plus tôt sera le mieux.
PS : Voici le paragraphe concernant le rôle des parents dans la lettre que le président de la République vient d'adresser à tous les enseignants.
"Parents, vous êtes les premiers des éducateurs. Je sais combien ce rôle est difficile quand le chômage menace, quand la famille se recompose, quand le père ou la mère se retrouve tout seul pour élever ses enfants. Je sais combien la vie peut être lourde. Je veux vous dire que vous serez soutenus, que vous serez aidés à chaque fois que vous en aurez besoin pour éduquer vos enfants dès le plus jeune âge et que pour moi la politique familiale fait entièrement partie du projet éducatif."
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