Symptomatique, l'unanimité dans l'éloge qui salue depuis ce matin la disparition de Jacques Martin. Elle témoigne d'abord du talent de ce surdoué de la radio et de la télévision : des duos avec Jean Yanne au Petit Rapporteur, de la Lorgnette à l'Ecole des Fans, cet amuseur-né savait faire rire, distraire, informer ou émouvoir. Tous louent son impertinence, mais en oubliant de rappeler que celle-ci savait être rude sans méchanceté et populaire sans vulgarité : c'est tout ce qui le différencie de la plupart des "humoristes" présents aujourd'hui sur nos plateaux, dont l'inculture n'a souvent d'égale que la prétention.
Car c'est là, je crois, la seconde raison de l'émotion générale qu'a provoquée ce décès : la nostalgie d'une époque, pas si lointaine, où la télévision française savait innover, faire rire, inventer des programmes qui n'existaient nulle part ailleurs et rencontrer pourtant un grand succès d'audience. En ce temps-là, la couleur balbutiait, les chaines étaient encore publiques et dix fois moins nombreuses. De nos jours, la technique est parfaite, le choix est plus large et les moyens beaucoup plus importants. Pourtant, à quelques exceptions près, ce ne sont que films vus et revus, séries américaines débiles, jeux formatés achetés à l'étranger, sans oublier la soi-disant "télé-réalité", en réalité totalement préfabriquée pour exploiter ce qu'il y a de plus bas en nous.
En pleurant Jacques Martin, c'est sans doute aussi sur la télévision actuelle que nous versons quelques larmes...
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