Qu'elle soit aussi massive qu'annoncée ou pas, la grève de demain dans les transports publics présente d'ores-et-déjà une particularité largement reconnue : son inutilité. Très majoritairement soutenus par l'opinion publique, comme le prouvent plusieurs sondages publiés hier et aujourd'hui, le chef de l'Etat et son gouvernement ont fait savoir qu'ils ne cèderaient pas, et que les régimes spéciaux de retraite seraient bel et bien, après concertation, alignés sur le régime général de la fonction publique. A noter d'ailleurs que celui-ci reste malgré tout plus avantageux que celui du secteur privé.
Le seul effet de cette grève sera donc, une fois de plus, de prendre les usagers en otages et de paralyser pendant vingt-quatre heures l'activité du pays, qui n'a pas vraiment besoin d'un tel handicap supplémentaire. Et ce au moment où, paradoxalement, quelques timides bonnes nouvelles semblent apparaître à l'horizon économique, contredisant l'opinion très répandue selon laquelle le "choc de confiance" espéré par Nicolas Sarkozy - notamment grâce à l'adoption du "paquet fiscal" - ne se serait pas produit.
Présentant ces jours-ci à l'Assemblée nationale le projet de budget pour 2008, la ministre de l'Economie Christine Lagarde maintient non seulement sa prévision de croissance entre 2 et 2,5% l'an prochain, mais elle confirme le chiffre de 2% pour cette année, malgré le choeur des prévisionnistes qui tablent plutôt sur 1,8%. Il est vrai que ces prévisions pessimistes sont la conséquence de la faible croissance enregistrée au premier semestre (donc avant les mesures économiques du nouveau pouvoir), et notamment du chiffre très décevant du deuxième trimestre, 0,3%. D'où Mme Lagarde, se demandent certains, tire-t-elle donc son relatif optimisme ?
En fait, deux indicateurs, considérés comme très significatifs et portant sur la période postérieure à l'élection présidentielle, sont venus regonfler le moral des pouvoirs publics. Tout d'abord la consommation des ménages français en produits manufacturés : après avoir reculé de 0,1% en avril et de 0,8% en mai, elle a vivement rebondi pendant les trois mois suivants, avec +1,6% en juin, +0,9% en juillet et +1% en août. Mieux encore, cette forte hausse est due à la consommation en biens durables (automobiles, équipements du logement en mobilier, électroménager et électronique), qui témoigne généralement d'une confiance accrue en l'avenir.
Ces chiffres sont donc bien supérieurs aux attentes des "experts", qui tablaient sur 0,2% en juillet et 0,3% en août : comme quoi les prévisions des économistes peuvent parfois s'avérer fausses. Comme l'a reconnu l'un d'entre eux, "il faut remonter à 1995 pour trouver trace de trois mois de rang aussi dynamiques", alors qu'un autre pronostique : "Cela devrait se traduire par un rebond de la croissance au troisième trimestre après la déception du deuxième". Exactement ce que veut dire Christine Lagarde lorsqu'elle annonce : "Le troisième trimestre vous surprendra".
D'autant qu'une autre statistique est venue elle aussi surprendre les Cassandre : celle concernant les mises en chantier de logement, qui ont bondi de +13,6% en juin-juillet-août par rapport à la même période de l'année précédente, les permis de construire repassant eux aussi dans le vert durant ces trois mois. Sans aller jusqu'à entonner le vieux refrain "quand le bâtiment va, tout va", force est de constater qu'il n'y a pas que de mauvaises nouvelles sur le front de l'économie. Et que ces chiffres justifient bien que l'on attende encore un peu pour connaître les premiers résultats des premières réformes, et savoir en conséquence si le "choc" sarkozien a eu lieu ou pas.
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