En écoutant ce samedi matin sur Europe 1, au micro de Dominique Souchier, le professeur Didier Sicard, président du Comité consultatif national d'éthique, s'élever contre le principe même des tests ADN, deux réflexions me sont venues à l'esprit pour compléter utilement ma note d'hier.
1) Le professeur Sicard rappelle, sans trop donner de détails, que la famille africaine se définit d'une façon plus extensible que la nôtre : "Souvent, si le père ou la mère disparait, c'est un frère ou une soeur du disparu qui élève ses enfants...". En cas d'adoption légale, rappelons que le processus classique du regroupement familial, fondé sur des papiers d'état civil authentiques, continuera de fonctionner. Mais le même argument est développé dans une dépêche du correspondant au Sénégal de l'agence de presse Reuters. "Nombreux sont les Africains, écrit-il, qui voient dans cette initiative une nouvelle preuve d'un racisme qui serait solidement enraciné dans les mentalités de l'ancienne puissance coloniale. Ils soulignent que le texte voté (...) prend en compte une notion bien étriquée de la famille, peu conforme à la tradition africaine où la cellule familiale comporte aussi bien les oncles, les tantes que les cousins éloignés." Si l'on comprend bien l'honorable correspondant, nous sommes priés, sous peine d'être accusés de "racisme", de nous plier à la "tradition africaine", et donc de laisser entrer chez nous ces vastes familles, pour ne pas dire ces véritables tribus. Au passage, la "tradition africaine" admet fréquemment la polygamie, en principe incompatible avec la loi française...
2) Reprenant l'argument avancé par le socialiste Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, le professeur Sicard s'interroge : "Que diraient les Français si les Américains leur imposaient des procédures comparables pour se rendre aux Etats-Unis ?" Faut-il rappeler à l'excellent professeur que, depuis le 26 octobre 2005, les Etats-Unis imposent à tous les étrangers désirant se rendre sans visa sur leur territoire l'usage d'un passeport "biométrique", qui a nécessité le renouvellement progressif de l'ensemble des passeports français, non sans problèmes techniques d'ailleurs ? Que ce passeport, destiné à lutter contre l'augmentation des faux papiers (tiens donc...) et des risques de terrorisme qui en découlent, comporte non seulement une photo numérisée infalsifiable, mais aussi une puce électronique recelant des données personnelles (photo, empreintes digitales et bientôt iris de l'oeil), lue automatiquement lorsqu'on franchit la douane ? Il s'agit pourtant là de contraintes beaucoup plus lourdes que celles liées aux tests ADN, qui plus est imposées à tous et non pas réservées aux seuls volontaires. On n'a pourtant entendu protester aucune des grandes âmes qui ont pétitionné à tour de bras ces dernières semaines. Doit-on en déduire que seuls les Etats-Unis ont le droit de protéger leur territoire et de tenter d'en réserver l'accès aux étrangers en règle ?
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