Qu'il me soit permis de ne pas partager ici l'opinion généralement émise sur le débat d'hier soir, selon laquelle il ne nous aurait rien appris et se serait soldé par un match nul, peu susceptible d'influer sur le vote final. Même si ce dernier point est difficile à évaluer, cette émission a permis à plus de vingt millions de Français de se faire une idée assez précise de la compétence et de la personnalité des deux finalistes.
Sur la compétence, pas de véritable surprise : même s'il a commis une ou deux erreurs de chiffres, Nicolas Sarkozy a une fois de plus confirmé sa maîtrise des grands dossiers, qu'il s'agisse de la réduction de la dette publique, de la diminution du nombre de fonctionnaires, de la meilleure façon de sortir du piège des 35 heures, du financement des retraites, de la baisse de la fiscalité ou de la lutte contre l'insécurité et la délinquance. Face aux mesures concrètes qu'il propose sur tous ces sujets, Ségolène Royal s'est limitée à de vagues déclarations de principe, promettant des "moratoires" ou des "discussions entre partenaires sociaux", quand elle ne versait pas dans le ridicule en demandant que les femmes policiers de service la nuit soient raccompagnées chez elles par d'autres policiers... En ce qui concerne l'Europe, Sarkozy a même apporté deux précisions intéressantes : il prend acte de ce que "la Constitution européenne n'entrera pas en vigueur, puisque les Français ont dit non", ce qui signifie que le traité simplifié qu'il souhaite n'aurait pas valeur de constitution, et il réitère fermement son opposition définitive à l'entrée de la Turquie dans l'Europe, à laquelle elle n'appartient pas.
Mais c'est surtout sur la forme que les deux protagonistes ont montré leur vrai visage, leur véritable personnalité. Nicolas Sarkozy, l'"autoritaire", le "brutal", s'est révélé un homme calme, pondéré, maîtrisant parfaitement ses réactions et ne tombant pas dans les pièges que constituaient les multiples provocations de son adversaire. Quant à Ségolène Royal, loin de la pauvre femme victimisée sous les traits de laquelle elle aime à se présenter, elle est apparue telle que ses administrés de Charente-Poitou la connaissent depuis trois ans : dure, autoritaire, agressive et sectaire au point de ne pas vouloir répondre aimablement aux quelques paroles courtoises qu'a pu lui adresser le président de l'UMP.
Le summum a été atteint avec cette "vraie-fausse colère", préfabriquée autant que surjouée, au sujet de la scolarisation des enfants handicapés. Une sortie totalement artificielle, puisque l'on connait aujourd'hui la vérité sur ce dossier : certes, le plan "Handiscol" de Mme Royal a bien disparu, mais il a été remplacé et complété par la "loi Handicap" voulue par Jacques Chirac et votée en 2005. Résultat : les 5000 "emplois-jeunes" des socialistes sont devenus 6000 "auxiliaires de vie scolaire" sous contrat avec l'Education nationale, et les 90.000 handicapés accueillis dans des établissements scolaires "normaux" en 2002 sont aujourd'hui au nombre de 160.000 ! Pas vraiment de quoi crier au scandale et à "l'immoralité politique", même si beaucoup de progrès restent à accomplir.
Dernière minute : un sondage de l'institut OpinionWay réalisé pour le Figaro et LCI nous apprend que 53% des téléspectateurs ayant regardé le débat ont jugé Nicolas Sarkozy "le plus convaincant", 31% seulement portant le même jugement sur Ségolène Royal. Décidément, ces temps-ci, les Français sont plus intelligents que bien des commentateurs...
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