S'il fallait une preuve que la France a besoin d'évoluer et de sortir du prêt-à-penser, la minable polémique qui entoure les trois jours de repos que s'est octroyé Nicolas Sarkozy suffirait. Qu'un président élu, mais pas encore en fonctions, puisse profiter sans se cacher de l'avion et du yacht qu'un chef d'entreprise de ses amis met gracieusement à sa disposition pendant ce court laps de temps, et voilà la gauche et ses comparses qui hurlent au scandale ! En feignant d'oublier que Vincent Bolloré, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a bâti son groupe et sa fortune à partir d'une entreprise familiale qu'il a redressée, n'a jamais eu besoin ni des financements ni des commandes de l'Etat, est un ami personnel de très longue date du nouveau président, et que ce déplacement privé n'a pas coûté un centime d'argent public. Mais Nicolas Sarkozy a peut-être sous-estimé le vieux fond de jalousie et de haine sociale qui, sous couvert d'égalitarisme, caractérise notre pays et explique au moins autant que la fiscalité le départ de bien des grands patrons. Alors que, dans la plupart des autres pays développés, une telle affaire aurait fait "pschitt", pour parler comme Jacques Chirac.
A propos de Chirac, il est significatif que le dernier acte que celui-ci accomplisse à l'égard de Nicolas Sarkozy soit une ultime petite "vacherie" : alors que le nouveau président s'était nettement démarqué de son prédécesseur pendant la campagne en condamnant toutes les "repentances" dont on nous abreuve depuis douze ans, Chirac a lourdement insisté pour qu'il soit présent demain afin de commémorer à ses côtés l'abolition de l'esclavage, tant et si bien que Sarkozy a dû revenir sur son refus initial et voit ainsi parasitée sa première sortie officielle...
Mais tout ceci est de peu d'importance : ce qui compte réellement, c'est la politique qui sera réellement mise en oeuvre, et le choix des hommes qui seront chargés de l'appliquer. Espérons que la formation du nouveau gouvernement, qui devrait intervenir aux alentours du 17 mai, dissipera quelques rumeurs complaisamment répandues par certains médias. Car, même si quelques signes d'ouverture peuvent être envoyés vers le centre, en particuliers vers ceux de l'UDF qui ont soutenu Sarkozy au second tour, il ne faudrait pas trop vite oublier que le peuple français a massivement voté non seulement pour la "rupture", mais bel et bien pour une rupture de droite. Et que cette rupture-là passe par l'arrivée d'hommes et de femmes nouveaux bien décidés à appliquer la politique clairement définie par le candidat Sarkozy et majoritairement approuvée par les électeurs. Et non pas par la réapparition de vieux chevaux de retour, du genre Kouchner, prompts à changer de gamelle pourvu que le picotin soit frais ! Une déception du "peuple de droite " à ce niveau-là serait incontestablement plus lourde de conséquences pour le nouveau président que quelques vaguelettes artificielles au large de l'île de Malte...
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