Manifestation de soutien aux "sans-papiers" hier à Paris, grève de la faim de 50 clandestins à Lille (qui ont refusé des solutions pourtant acceptées par des associations humanitaires), exploitation éhontée de l'accident dramatique d'Amiens (la chute d'un jeune garçon ayant sauté d'un balcon pour suivre son père tentant d'échapper à une interpellation policière), conseil interministériel sur l'immigration demain : aucun doute n'est permis, la lutte contre l'immigration clandestine sera l'un des sujets "chauds" de la rentrée. Et l'un des tests qui permettra de vérifier, au-delà des effets d'annonce, la détermination du pouvoir - avec en première ligne Nicolas Sarkozy et son fidèle lieutenant Brice Hortefeux - face à un problème essentiel pour la société française.
C'est dans ce contexte tendu que Le Figaro révélait lundi dernier, dans sa rubrique "Télévision", une nouvelle pour le moins surprenante : l'actrice Isabelle Carré tourne actuellement à Calais, pour France 3, un téléfilm intitulé "Maman est folle", dans lequel elle incarne une mère de famille qui se lance à corps perdu dans le soutien aux "sans-papiers", c'est-à-dire aux immigrés clandestins. Et les déclarations des protagonistes ne laissent aucun doute sur l'orientation de l'oeuvre : "Si cette femme est heureuse avec son mari, explique Isabelle Carré, elle vit dans une bulle. Elle va trouver une force nouvelle auprès des migrants" ; et le réalisateur, Jean-Pierre Améris, visiblement inspiré par l'affaire de Sangatte, d'ajouter : "Ce sont des aventuriers modernes, des survivants, des hommes courageux".
Mieux encore, entre deux prises de vues, l'actrice sort son "petit magnétophone" (dixit Le Figaro) pour interviewer des clandestins ou leurs soutiens, afin de réaliser un reportage pour l'émission "Esprit critique" de France-Inter (autre onde nationale), qui sera diffusé une semaine avant le téléfilm. Le mot de la fin, d'une rare niaiserie, revient à l'héroïne : "On se rend compte que nous faisons partie du club très privilégié de gens qui peuvent voyager comme ils prennent le métro". Qu'elle essaye simplement d'entrer illégalement dans la plupart des pays du monde, et elle reverra sa copie...
Mais l'essentiel n'est pas là. Il est dans le fait que la France est un Etat de droit, où l'entrée et le séjour irréguliers sur le territoire sont depuis toujours un délit. Et, depuis une ordonnance du 2 novembre 1945 complétée par la loi entrée en application le 1er mars 2005, l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers est également un délit. Il n'est pas inutile de rappeler trois extraits de cette loi, qui forme l'essentiel du "Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile" actuellement en vigueur.
- Article L.622-1 : Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger en France sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30.000 euros.
- Article L.622-5 : Les infractions prévues à l'article L.622-1 sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 750.000 euros lorsqu'elles sont commises en bande organisée.
- Article L.622-8 : Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux articles L.622-1 et L.622-5.
D'où une série de questions sur lesquelles pourraient utilement se pencher MM. Patrick de Carolis, PDG de France-Télévisions (généralement mieux inspiré dans ses programmations), Jean-Paul Cluzel, président de Radio-France, et Michel Boyon, président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, ainsi d'ailleurs que le ministre Brice Hortefeux et tous les parlementaires de droite que le sujet inspire :
1) L'apologie de l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'étrangers en France, qui constitue manifestement le sujet du téléfilm "Maman est folle", est-elle assimilable à "l'aide indirecte" prévue par l'article L. 622-1 de la loi du 1er mars 2005 ?
2) L'équipe réalisant le téléfilm "Maman est folle", se livrant à l'apologie de l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'étrangers en France, constitue-t-elle une "bande organisée" au sens où l'entend l'article L.622-5 de la loi du 1er mars 2005 ?
3) Les sociétés audiovisuelles publiques France 3 et France-Inter, qui prévoient manifestement de se livrer, en diffusant les émissions "Maman est folle" et "Esprit critique", à l'apologie de l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'étrangers en France, peuvent-elles être considérées comme des "personnes morales" au sens où l'entend l'article L.622-8 de la loi du 1er mars 2005 ?
Imaginez simplement, ce qui est tout-à-fait possible, que l'une au moins de ces trois questions reçoive une réponse positive ! Les conséquences en seraient exemplaires : c'est pourquoi je me propose, et je propose à tous ceux qui partagent mon indignation, de suivre cette affaire de très très près...
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