Une première au goût amer : la mise en examen d'un ancien président de la République, en l'occurrence Jacques Chirac, constitue un événement sans précédent dans la vie politique française. Certains arguments avancés par ses partisans, indignés par la décision du juge Xavière Simeoni, semblent peu recevables, surtout quand ils s'étonnent du délai existant entre les faits reprochés - commis entre 1983 et 1995 - en estimant qu'il est "trop tard pour bien juger, vingt ans après les faits" : si ce délai existe, c'est bien parce que le chef de l'Etat est protégé pendant son mandat par une immunité judiciaire, et qu'ils n'est redevenu un citoyen comme les autres qu'un mois après son départ de l'Elysée.
Ce qui frappe, en revanche, c'est la modicité de cette affaire, dite "des chargés de mission de la Ville de Paris" : il est reproché à Jacques Chirac, maire pendant dix-huit ans, d'avoir embauché en CDD, à des salaires peu élevés, moins de vingt personnes pour occuper des postes qui pourraient être des emplois de complaisance ! Pour bien situer les choses, et le peu d'incidence que cela a pu avoir sur les finances municipales, rappelons que le nombre d'employés municipaux dans la capitale est supérieur à 40.000... On voit alors que le chef avilissant de "détournement de fonds publics" qualifiant la mise en examen est sans proportion avec la réalité des faits, d'autant qu'aucun enrichissement personnel n'est reproché à l'ancien maire de Paris.
Tout comme sa soeur jumelle, celle des "emplois fictifs", dans laquelle Jacques Chirac n'est pour l'instant que "témoin assisté", l'affaire des "chargés de mission" est un dossier mineur, survenu de plus à une époque où l'encadrement juridique de la vie politique était beaucoup moins précis qu'aujourd'hui. Ceci n'a pas empêché une partie de la gauche, les procureurs Montebourg et Mamère en tête, de se livrer à des commentaires aussi déplacés qu'indécents, le premier osant même parler de "victoire posthume" de la justice ! Pour éviter ce genre de propos, Jacques Chirac s'honorerait d'ailleurs à ne pas occuper volontairement, pendant la durée de l'instruction et de l'éventuel procès, le siège qui lui revient de droit et à vie au Conseil constitutionnel.
Une remarque pour conclure, que partageront, je pense, tous ceux qui ont vécu ou milité dans ce qu'on appelait naguère la "ceinture rouge", c'est-à-dire la banlieue parisienne. Pendant des décennies, toutes ces municipalités communistes ont salarié par centaines de faux employés municipaux, qui étaient en réalité des permanents du PC ou de la CGT, et cela au vu et au su de tout le monde. Sur un demi-siècle environ, cette pratique représente sans aucun doute des sommes considérables, détournées des impôts locaux payés par les habitants modestes de ces communes. Chose étrange, aucune plainte n'a jamais été déposée, aucune information judiciaire n'a jamais été ouverte ! Il faut croire qu'il est plus gratifiant pour un juge d'instruction de mettre en examen un ancien président de la République qu'un obscur maire communiste de banlieue...
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