Toute la gauche et ses supplétifs, de Hollande à Bayrou en passant par l'ex-juge Eva Joly (1), se sont trouvés ces jours-ci une nouvelle menace à dénoncer, un nouveau fléau à combattre : la "berlusconisation" de la France à laquelle se livrerait, depuis son élection, Nicolas Sarkozy. La preuve ? Laurent Solly, son directeur adjoint de campagne, vient de rejoindre le groupe Bouygues et devrait ultérieurement exercer des fonctions au sein de TF1. Et tous d'entonner le grand air de la frayeur indignée, oubliant au passage que Sarkozy, contrairement à Silvio Berlusconi lorsqu'il devint président du Conseil italien, n''est propriétaire d'aucun journal, d'aucune radio ni d'aucune chaine de télévision.
Mais venons-en au cas précis de Laurent Solly. Enarque, conseiller technique au cabinet de Nicolas Sarkozy lors du premier passage de celui-ci à l'Intérieur, chef de son cabinet à Bercy puis lors de son retour place Beauvau, plus jeune préfet de France l'an dernier, à l'âge de 36 ans, il fut l'un des piliers de la campagne de son patron, et ce malgré un drame personnel : la disparition brutale, en janvier, de son épouse. Grand spécialiste des enquêtes d'opinion, il était encore cité, juste après la victoire de son patron, parmi la garde rapprochée qui allait investir l'Elysée, où il devait occuper le poste prestigieux de directeur de cabinet du président de la République.
Puis, en quelques jours, tout a changé. Et il suffit simplement de lire le communiqué du groupe Bouygues pour comprendre que l'arrivée de Laurent Solly n'est en rien une opération préméditée, ce qui aurait été le cas si Nicolas Sarkozy avait voulu tisser une toile d'araignée autour de la première chaine française, dont il est par ailleurs déjà l'ami du propriétaire, Martin Bouygues. Que dit ce communiqué ? «Bouygues précise que Laurent Solly arrive à la holding du groupe Bouygues à compter du 23 mai 2007. Il y effectuera un parcours d’intégration au sein du groupe. En temps voulu, en accord avec Martin Bouygues et Nonce Paolini, il rejoindra TF1, où il deviendra directeur à la direction générale. Ses missions seront définies à ce moment-là.» "Parcours d'intégration", "en temps voulu", missions à définir : tout cela ne sent pas vraiment le complot ourdi de longue date, mais reflète plutôt une certaine improvisation.
Que s'est-il donc passé en réalité ? Au dernier moment, il est décidé que Laurent Solly ne rejoindra pas l'Elysée. La raison ? Soit une incompatibilité totale d'humeur entre lui et la femme du président, qui aurait exigé et obtenu son départ, soit une soudaine volonté du jeune préfet de bifurquer vers le privé, la première explication étant de loin la plus plausible. Et que fait à ce moment-là Nicolas Sarkozy ? Comme tout patron digne de ce nom, il cherche à aider ce collaborateur estimé à se "recaser", et décroche son téléphone pour en parler à quelques amis et relations susceptibles de l'embaucher, parmi lesquels Martin Bouygues. Le groupe Bouygues en général et TF1 en particulier étant en pleine restructuration, liée au départ en retraite de plusieurs "poids lourds" de la maison, on peut comprendre que son PDG ait vu quelque intérêt à embaucher un jeune cadre supérieur de la stature de Laurent Solly. Il se dit d'ailleurs que ce dernier pourrait prendre à terme le poste de directeur financier de TF1, l'actuel titulaire du poste étant sur le départ. Si cela se confirme, Laurent Solly n'occuperait donc même pas un poste en liaison avec le contenu rédactionnel de la chaine : on est vraiment loin, très loin, de la "berlusconisation" fantasmée par certains.
Par ailleurs, puisqu'on parle de "moralisation de la vie politique", il est dommage qu'une des mesures adoptées au dernier conseil des ministres n'ait pas été plus remarquée : dorénavant, les appartements de fonction des ministres seront considérés comme un "avantage en nature", c'est-à-dire intégrés dans le calcul de l'impôt sur le revenu de leurs occupants, qui devront en outre payer les taxes locales correspondantes. On n'a guère entendu les applaudissements de ceux qui poussaient des cris d'orfraie lors de "l'affaire Gaymard"...
(1) En ce qui concerne madame Eva Joly, il est extraordinaire de voir cette ex-magistrate française donner, pour la promotion de son livre, de multiples interviews dans lesquelles elle se livre à de véritables agressions politiques. Comme lorsqu'elle déclare à propos de Nicolas Sarkozy "il ne suffit pas de citer Jaurès pour être un démocrate", ou à propos de Jacques Chirac "j'attends que la justice ouvre une enquête sur son compte japonais", comme si la justice française ne savait pas ce qu'elle a à faire. Tout ceci ne surprendra pas ceux qui se souviennent avec quel sectarisme idéologique puisé à l'extrême-gauche Mme Joly menait naguère ses instructions en France. Mais il est quand même étonnant que son poste officiel actuel, conseillère anti-corruption du gouvernement norvégien (son pays d'origine), n'implique de sa part aucun devoir de réserve.
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