Ainsi Madame Royal a-t-elle jugé "assez ignoble" l'intention de Nicolas Sarkozy, s'il est élu, de créer un ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale. Passons sur l'étrangeté de la formule employée par la candidate socialiste, dont on sait que la langue française n'est pas un des points forts. Le terme "ignoble" étant violent par lui-même, on voit mal comment on peut qualifier quelque chose ou quelqu'un de "modérément", "un peu" ou "assez" ignoble. A moins qu'elle n'ait eu conscience, en le prononçant, du caractère excessif du propos, et qu'elle n'ait tenté ainsi de l'atténuer. Mais peu importe, puisque Ségolène ne fait que participer à la grande clameur du choeur des vierges effarouchées de gauche et d'extrême-gauche qui se déchaine depuis la déclaration de Sarkozy. Avec au premier rang des choristes aussi démocratiquement sincères que le Parti communiste, le Mrap ou la LCR, auxquels François Bayrou a, hélas, cru utile d'apporter son renfort...
Participant vendredi soir, sur I-Télé, à l'émission "N'ayons pas peur des mots", j'ai eu un parfait résumé de leur partition par la voix de Patrick Pelloux, médecin urgentiste célèbre pour son engagement politique et syndical très marqué à gauche, qui a proféré une double affirmation : "Par cette proposition, Nicolas Sarkozy stigmatise l'immigration, qui n'est pas un problème pour l'identité nationale". En ce qui concerne la première, on se demande bien où est la "stigmatisation" en question. Sarkozy a lui-même répondu dès le lendemain : "Si l'on veut intégrer des gens venus d'ailleurs, il n'est pas inutile de rappeler qui nous sommes. Si vous ne parlez pas de l'identité de la France, comment voulez-vous que ceux qui arrivent en France pour devenir Français puissent y adhérer ?"
Mais c'est surtout la seconde affirmation de Patrick Pelloux, et de la gauche en général, selon laquelle "l'immigration n'est pas un problème pour l'identité nationale", qui constitue un gigantesque déni de réalité prouvant que ses auteurs n'ont rien compris ni rien appris depuis 2002. Aucun rapport avec l'immigraion, l'insécurité ou les émeutes dans les "quartiers sensibles" ? Aucun rapport avec l'immigration, les 80 000 enfants (10% d'une classe d'âge) qui débarquent chaque année en sixième sans lire ni écrire le français, tirant ainsi vers le bas l'ensemble de l'éducation nationale ? Aucun rapport avec l'immigration, l'explosion du budget de l'AME (aide médicale d'Etat), destinée à payer les frais de santé des clandestins et autres sans-papiers soignés et hospitalisés chez nous ? Rien à voir avec l'immigration, l'engorgement de notre système de logements sociaux, tel que les travailleurs français ont le plus grand mal à y accéder ? Et l'on pourrait multiplier à l'envi les exemples d'institutions, constitutives de ce qu'est aujourd'hui notre identité nationale, mises à mal par plusieurs décennies d'immigration aussi massive qu'incontrôlée : c'est cette politique-là qu'il faut "stigmatiser", et non pas les immigrés eux-mêmes qui ne sont pas - sauf les illégaux - responsables de cet état de fait.
"Mais non, rétorque le choeur des vierges, tout ceci n'a rien à voir avec l'immigration, puisque la plupart de ceux que vous mettez en cause sont nés en France, donc Français". Certes, mais c'est bien cette politique d'immigration, aggravée par un code de la nationalité permissif et obsolète, qui a entrainé l'apparition de ces Français "de papier", qui ne partagent ni l'histoire ni les valeurs ni parfois même la langue de notre pays. Et c'est bel et bien parce que nous n'avons pas su - ou pas voulu - leur faire partager notre identité que nous en sommes là. Et qu'il faut aujourd'hui tenter de rattraper le temps perdu, aussi bien pour ceux qui sont déjà sur notre sol que pour ceux qui désireraient y venir.
Bien sûr, je ne suis pas dupe des arrière-pensées qui ont pu animer Nicolas Sarkozy lorsqu'il a annoncé la création de ce futur ministère (voir ma note du 6 mars sur les signatures de Le Pen). Il n'en est pas moins vrai qu'il a pris une position courageuse sur un sujet déterminant, et la réaction hystérique de la gauche prouve qu'il est plus que temps, en effet, de parler de notre identité nationale. Afin que la France ne soit plus, selon la phrase terrible de Milan Kundera, grand écrivain tchèque devenu français en 1981, "le seul pays au monde où l'on apprend à détester son pays".
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